Réaliser un investissement locatif, comme n’importe quel investissement, comporte des risques. Ces risques sont très souvent perçus de manière disproportionnée. Pour cette raison, il est essentiel de les connaître et de les quantifier. Afin de les inclure dans votre prévisionnel et d’ajuster votre offre en conséquence.
Etudions de plus près les principaux risques associés à l’investissement locatif d’habitation et la manière dont vous pouvez les limiter au maximum.
Table des matières
Vacance locative
La vacance locative est la période pendant laquelle votre bien n’est pas loué. Il faut distinguer :
- la vacance locative que j’appelle “circonstancielle” (lorsque vous réalisez des travaux de rénovation dans vos appartements par exemple, ou entre deux locations) qui est incompressible, de
- la vacance locative subie (la plus critique).
Définition globale détaillée d’un logement vacant, d’après l’INSEE : « logement inoccupé. Il peut s’agir d’un logement proposé à la vente ou à la location, d’un logement déjà attribué à un acheteur ou un locataire et en attente d’occupation, d’un logement en attente de règlement de succession, d’un logement conservé par un employeur pour un usage futur au profit d’un de ses employés ou encore d’un logement gardé vacant et sans affectation précise par le propriétaire » .
La vacance locative subie que vous allez rencontrer dans la vie courante de vos investissements locatifs intervient principalement :
- après l’achat, le temps de remettre en location des appartements qui n’auraient pas été reloués par le vendeur ;
- au départ d’un locataire ;
- le temps de réaliser des travaux de rafraichissement si nécessaires, après une longue période de location ;
- en raison d’un loyer trop élevé par rapport au marché ;
- en période estivale dans le cas des opérations qui ciblent les étudiants ;
Vacance locative : comment impacte-t-elle votre rentabilité ?
La vacance locative abaisse bien entendu le taux de rentabilité de votre investissement et impacte directement vos cash flow (flux de trésorerie). Pour les investissements dont la rentabilité est proche ou en dessous du taux de rentabilité brute d’équilibre (à partir duquel un investissement locatif est totalement autofinancé), chaque semaine de vacance locative additionnelle sera à financer en fonds propres. C’est à dire par un effort d’épargne supplémentaire.
Sur un immeuble de 450 000€ générant 40 000€ de loyers hc/an, chaque semaine/année de vacance locative vous coûte environ 800€.
Vacance locative : quels sont les chiffres en France ?
La vacance locative moyenne était de 8% en France en 2018 d’après l’ INSEE (au même niveau qu’en 1980). Elle a très légèrement augmenté ces dernières années (tout en restant inférieure à 10%).
Ce taux masque bien entendu de fortes disparités selon les villes, avec un taux très faible à Paris et dans les grandes métropoles françaises de plus de 150 000 habitants.
Par ailleurs, l’INSEE précise les raisons de la vacance locative en France:



Ainsi, dans à peine 10% des cas, cette vacance locative est une vacance locative subie, résultant d’une difficulté à louer le logement.
Au final, les chiffres de l’INSEE indiquent donc que le taux de vacance locative subie est inférieur à 1% en France (8% x 9%). Ce qui est très faible.
Ces chiffres sont néanmoins à prendre avec précautions. L’INSEE ne précise pas si la comptabilisation de la vacance intervient à partir d’une certaine durée d’inoccupation.
Vacance locative : quel est l’impact de la crise actuelle ?
La crise actuelle, dont nous ne voyons pas encore la totalité des effets sur l’économie réelle, aura pour conséquence inévitable le repli à court terme du revenu disponible des ménages français. Repli provoqué par le fort recul de l’activité économique (-11% selon les dernières déclarations de Bruno Lemaire le 2 juin 2020) qui se traduira par une forte hausse du taux de chômage.
L’indice des loyers devrait en conséquence, à l’échelle nationale, suivre une tendance similaire. C’est à dire un repli mesuré et temporaire. Comme je le montre dans cette analyse détaillée, la tendance longue observée depuis 1965 en France est en effet une évolution de l’indice des loyers au même rythme que celui du revenu disponible des ménages.
Cela se traduira à court-terme par une baisse des loyers en France, ou à une hausse de la vacance locative à loyer constant.
Note : précisons que la baisse du revenu disponible des ménages restera néanmoins contenue, du fait d’aides sociales apportées aux ménages les plus défavorisés. Notamment les aides au logement telles que la CAF et les APL, propres au modèle français.
Vacance locative : comment limiter au mieux le risque ?
Proposez des logements de qualité !
C’est le plus important. Cela signifie un aménagement intérieur réalisé avec soin, une configuration optimisée des espaces (notamment dans le cas des petites surfaces et des collocations), un rafraîchissement régulier des biens que vous louez, un entretien courant des parties communes et privatives au fil de l’eau, des travaux de rénovation lorsqu’ils sont nécessaires.
En ce qui concerne la rénovation et l’aménagement intérieurs d’appartements, sollicitez des artisans qui vous aurons été recommandés ou avec lesquels vous avez déjà travaillés. Ne cherchez pas à tout prix l’économie de coût. Avoir des travaux de qualité a un prix qu’il faut savoir accepter de payer. Cela s’avère largement bénéfique sur la durée. Ne travaillez pas avec des artisans dont les travaux ne sont pas couverts par la garantie décennale.
Pour les travaux de rénovation plus complexes, je vous conseille vivement de solliciter les services d’un architecte qui vous fera des propositions éclairées d’aménagement et gérera la sélection des artisans et le suivi des travaux.
Analysez l’offre et la demande locative locale avant de positionner votre loyer.
Une simple observation des logements et loyers proposés sur Leboncoin peut vous donner un ordre d’idée. Attention toutefois, les offres que vous voyez sur ce site sont par définition celles d’appartements qui ne sont pas encore loués…peut-être à cause d’un mauvais rapport qualité/prix. Positionnez-vous donc à un meilleur niveau de qualité à loyer équivalent ou un niveau de loyer légèrement plus bas à niveau de qualité équivalente à la moyenne constatée.
Ajustez également le montant de loyer en fonction de votre expérience du niveau de tension locative sur votre marché et de l’élasticité loyer de votre demande locative. Dans certaines villes, une baisse/hausse de quelques dizaines d’euros par mois de votre loyer peut impacter considérablement votre demande locative.
Conseil : privilégiez un loyer au marché avec un faible taux de vacance locative, qu’un loyer dans la fourchette haute du marché avec une vacance locative importante. Indépendamment de l’arbitrage financier (vacance vs. montant de loyer) à estimer au cas par cas, votre sérénité sera meilleure avec un faible taux de vacance locative.
Contractualisez avec votre gestionnaire locatif plusieurs semaines avant la vente.
Cela lui permettra de récupérer les clés de votre bien dès le jour de la vente et d’être en mesure de commencer les visites le jour J. Si possible, demandez lui de récupérer les photos des lots vides pour mettre les annonces de location avant la vente (ce sera autant de temps de vacance locative de gagné).
Idéalement (pas facile à obtenir mais qui ne tente rien n’a rien), demandez l’autorisation au vendeur pour réaliser des visites du bien une fois votre offre de financement obtenue, afin de pouvoir faire rentrer des locataires dès la signature.
Remettez les annonces entre une et trois semaines avant le départ du locataire.
Ici également, cela vous permettra de gagner plusieurs jours, voir semaines, de location. Vous pouvez éventuellement échanger avec votre locataire pour lui accorder une réduction de son préavis de départ s’il trouve lui-même un repreneur. Toutes ces actions sont à communiquer à votre gestionnaire locatif afin qu’il les adopte dans son suivi.
Anticipez les besoins de rafraîchissement.
Avec l’aide de votre gestionnaire locatif, identifiez les lots qui nécessiteront des rafraichissements avant remise en location. Cela intervient dans la plupart des cas au départ d’un locataire longue durée. Anticiper ce besoin vous permettra de bloquer un début des travaux dès le départ du locataire et de « gagner » une fois de plus plusieurs jours/semaines de location.
Certaines typologies d’investissements (qui n’en sont pas moins des choix d’investissement possibles) sont structurellement plus impactés par la vacance locative. C’est le cas des appartements en colocation et des locations meublées (en raison d’une plus forte rotation des locataires) ainsi que des locations étudiantes en raison d’une vacance estivale plus élevée que la moyenne.
Le cas extrême est la location saisonnière qui implique une très forte vacance locative structurelle, dans la plupart des cas sous-estimée (durée par exemple avant qu’un logement Airbnb accumule des avis positifs et soit attractif, impact négligé des phénomènes exceptionnels comme le montre le cas actuel du Coronavirus). Pensez à bien anticiper cette vacance locative structurelle dans votre calcul de rentabilité, afin d’ajuster votre offre d’achat. Ce type de location s’avère par ailleurs plus risquée que de la location longue durée classique. La crise actuelle liée au Coronavirus en est un exemple malheureux. Exigez un excellent rendement locatif (>10%brute) si vous songez à choisir ce type d’investissement, afin de compenser ce risque accru.
Conseil : dans le cas de locations nues, préférez le semi-meublé (cuisine équipée + lave-linge + quelques éléments de mobilier de base). Mon expérience montre qu’investir dans ces équipements est rentable. Cela permet d’augmenter le taux d’occupation et le montant des loyers. Cela améliore également votre rentabilité locative globale (après prise en compte du sur-coût d’équipement).
Pour la plupart de ces sujets : choisissez bien votre agence car elle aura un impact très conséquent sur la vacance locative de vos biens. Vous devez vous appuyer sur des partenaires expérimentés et (très) réactifs.
Le cas de la vacance durant des travaux de rénovation.
Dans le cas où votre bien est vacant du fait de travaux, négociez impérativement auprès de votre banque un différé de remboursement suffisamment important pour couvrir la période de travaux. D’où l’avantage de réaliser vos rénovations au début de votre investissement plutôt qu’au fil de l’eau.
Impayés
Un impayé est différent d’un retard de paiement qui peut-être d’ailleurs tout aussi préjudiciable. Un impayé est défini comptablement comme la perte d’une créance, en l’occurrence d’un loyer dans les cas qui nous intéressent ici. Cela peut-être un impayé d’un ou plusieurs mois. C’est généralement la crainte #1 des investisseurs.
Encore une fois, bien que réel, la perception de ce risque est souvent disproportionnée. Comme souvent pour lutter efficacement contre nos nombreux biais cognitifs, il est important de se raccrocher aux chiffres.
Impayés : quels sont les chiffres en France ?
D’après l’étude générale de l’INSEE “Les conditions de logement en France” (dernière édition de 2017) : 4.5 % des locataires sont en situation d’impayé de loyers ou de charges, dans une proportion comparable à celle de 2006.
C’est un niveau qui reste limité. Attention toutefois, l’INSEE comptabilise les impayés à partir de 3 mois de retard de paiement.
Impayés : quel est l’impact de la crise actuelle ?
Les impayés affectent principalement les bailleurs de locaux commerciaux et dans une moindre mesure ceux de bureaux.
En ce qui concerne l’impact de la crise sur les impayés dans l’immobilier d’habitation, il reste à date et de mon observation personnelle relativement limité. Sur mon portefeuille de biens (près de 40 lots), ceux de mes clients et celui de mon réseau d’investisseurs, je n’ai pas constaté d’impact significatif de la crise du coronavirus sur le niveau d’impayé global, si ce n’est du fait des re-locations et des rafraichissements mis en arrêt pendant la période de confinement.
Pour des raisons similaires à celles vues ci-dessus, le modèle de protection sociale français joue pour les ménages un rôle d’amortisseur des chocs conjoncturels, dont bénéficient indirectement les bailleurs. Par ailleurs, certaines aides publiques comme la garantie VISALE que nous décrivons ci-dessous, permet de limiter d’avantage l’impact d’impayés de loyer pour les bailleurs, en couvrant la totalité des loyers non versés par les locataires éligibles.
Impayés : comment mieux maîtriser le risque (par ordre de priorité) ?
Diversifiez votre patrimoine en privilégiant, à patrimoine et rentabilité équivalente, le plus de lots possibles.
De ce fait, votre niveau d’impayé sera toujours proche de la moyenne nationale, c’est à dire à un niveau bas. Prenons le cas extrême d’un investisseur sur le marché locatif parisien qui a acheté 250 000€ en 2019 un studio de 20m2, loué 1 000€/mois pour une rentabilité brute de 4%.
Son opération nécessite un important effort d’épargne. En cas d’impayé, il est dans une situation financière très compliquée puisqu’il perd 100% de ses revenus locatifs. S’il avait acheté pour la même somme et à rentabilité équivalente quatre studios dans une ville secondaire de province, il serait bien moins exposé.
Choisissez bien vos locataires.
Ici encore, cela pourrait faire l’objet d’un article à part entière. Le plus important est de vous appuyer sur des professionnels de confiance. Comme je le conseille pour la réalisation des travaux, sous-traitez les tâches que des professionnels feront mieux et plus rapidement que vous.
Votre temps est précieux, mettez le à profit sur des tâches où il sera le mieux investi. Il s’agira donc pour vous de bien choisir votre agence et plus spécifiquement la personne qui va gérer votre bien. C’est son métier de choisir les meilleurs locataires pour votre appartement (ou votre local commercial/bureau le cas échéant)
Appuyez-vous sur les aides et garanties proposées par l’Etat.
La garantie Visale est un excellent exemple. Il s’agit d’un dispositif de Action Logement (alimenté par des fonds publics et des prélèvements privés) assez méconnu et dénigré à tort des agences et propriétaires. Il garantit gratuitement vos loyers en cas d’impayés.
Conseil : à choisir, demandez à votre gestionnaire locatif de privilégier un locataire couvert par la garantie Visale (paiement immédiat) à un locataire avec un garant personne physique. En cas d’impayé, il n’est pas toujours si facile à solliciter. La garantie Visale est soumise à certains critères. Sont couverts les locataires âgés de <30 ans ou ceux en contrat depuis moins de 6 mois. La garantie Visale doit être obtenue avant la date de début du bail.
Optez pour la garantie loyer impayés.
Elle coûte entre 1% et 4% des vos loyers hc. Je la déconseille personnellement au delà d’un patrimoine de plus de 15 lots. A ce niveau là de diversification, l’assurance vous coûterait probablement plus cher que les impayés réels de vos appartements. Pour vos premiers investissements et pour plus de tranquillité, prenez-la.
Le risque de moins-value
Une moins-value s’enregistre lorsque le prix de revente de votre bien est inférieur à son prix d’achat. Cela peut-être du à la dépréciation, sur votre période d’investissement, des prix de l’immobilier dans votre ville/quartier d’achat. Cela peut également provenir, à prix de l’immobilier constant, d’un prix d’achat mal négocié (achat au dessus du marché). D’où l’importance vitale de bien négocier le prix de votre bien.
C’est un paramètre que vous devez prendre en compte dans la modélisation de votre prévisionnel d’investissement et de rentabilité, bien qu’il soit difficile à estimer. Bien souvent, les premiers calculs de rentabilité ne prennent en compte que les prévisions de loyers.
Pourtant, une baisse significative du prix de votre bien au moment de la re-vente (occasionnant une moins-value) peut affecter considérablement votre rentabilité réelle et faire basculer votre opération d’un investissement rentable à un mauvais voir à un très mauvais investissement.
Tant que le bien n’est pas revendu, on parle de moins-value latente.
Impact de la moins-value sur votre rentabilité
Observons de plus près comment ce facteur impacte la rentabilité de votre opération. Pour cela, imaginons une opération extrêmement rentable : un appartement acheté et rénové pour un coût total de 100 000€ (sans crédit) et générant chaque année 10 000€ de revenus locatifs. Au bout de 5 années, l’investisseur décide de revendre son bien pour réaliser une opération plus conséquente.
Si le prix du bien reste constant, la rentabilité de l’opération est simple à calculer. Elle est de 10%.
A présent, observons l’impact d’une baisse de 20% puis de 50% du prix du bien au moment de la revente.
Dans le 3e cas, quelque peu extrême, le bien a perdu la moitié de sa valeur sur la durée de l’investissement. Bien que l’opération ait été de prime abord très alléchante, la réalité à la revente est tout autre. En dépit de tout le temps passé et des risques encourus, l’investisseur n’a pas gagné un centime sur l’opération.
Si la dépréciation du bien s’avère plus importante, l’investisseur aura une rentabilité réelle négative. Autrement dit, il aura perdu de l’argent.
C’est un cas extrême qui montre l’importance de garder en tête ce facteur lors de votre réflexion d’achat et ne pas vous en tenir uniquement au calcul de rentabilité brute de l’opération sur la base des prévisions de loyers et du prix d’achat. Face à un risque de moins-value important, vous devez exiger une meilleure rentabilité locative en contrepartie et donc un prix d’acquisition plus bas. Quitte, bien entendu, à ne pas réaliser l’opération si le vendeur n’est pas prêt à accepter votre offre.
Conseil : bien investir, c’est aussi savoir décliner une très grande partie des investissements potentiels. En ce qui me concerne, je ne me positionne que sur un nombre très limité d’opérations et les prix que je demande impliquent un taux extrêmement élevé de refus (plus de 90% de mes offres sont refusées par les vendeur). C’est parfaitement normal.
Deux types d’investissements, que je déconseille personnellement, sont fortement exposés au risque de moins-value.
- L’achat de défiscalisation (type Pinel) dans des villes de taille moyenne. Cela en raison a) du prix élevé à l’achat auxquels les promoteurs positionnent les biens au motif que ces achats bénéficient d’avantages fiscaux et b) du phénomène de revente groupée après la durée minimale de détention (6/9 ans…). Ce qui se traduit par un grand nombre de propriétaires vendant en même temps un bien ne bénéficiant plus pour le nouvel acquéreur de l’avantage fiscal. Ce qui fait pression à la baisse sur les prix de vente.
- L’achat dans les très petites villes où la rentabilité faciale de l’opération peut vous inciter à proposer un prix d’achat trop élevé, n’incluant pas totalement le risque de dépréciation du bien.
Moins-value : réalité du risque en France
- A court-terme
Rappelons quelques faits : le niveau d’endettement immobilier des ménages à très fortement augmenté depuis la fin des années 1990. Il passé de 33% à 81% du revenu disponible des ménages entre 2000 et 2018.
C’est en grande partie la conséquence de l’allongement de la durée des emprunts sur la période (+43%). Cela, dans un contexte de taux d’intérêt particulièrement favorables, est selon moi la principale cause de la très forte hausse de l’indice des prix observée depuis la fin des années 1990. Hausse à un rythme nettement supérieur à celui du revenu disponible des ménages.
Cette évolution, non durable, me laissait penser fin 2019 qu’une correction globale de l’indice des prix était probable à court-terme. Correction sans doute moins brutale que celle observée en Espagne ou aux Etats-Unis pour plusieurs raisons que je détaille dans mon article ci-dessous.
La crise actuelle devrait accentuer cette correction dans les années à venir. Avec de très fortes disparités géographiques, qu’il est difficile d’estimer. Les périphéries de villes secondaires et de manière générale les quartiers les moins attractifs (proximité transport, commerces, bassins emplois, contexte social…) seront sans doute les plus affectés.
- A long-terme
Le spécialiste du marché immobilier français, Jacques Friggit, a réalisé une étude approfondie de l’évolution des prix de l’ancien en France depuis 1960, sur la base de données INSEE et d’informations notariales.
Entre 1965 et 2020, l’indice des prix de logements anciens en France a été multiplié par 3, ce qui équivaut à une hausse tendancielle de +2%/an des prix.
Cette hausse tendancielle est observée à monnaie constante (c’est à dire en annulant l’effet de l’inflation) et à niveau de qualité équivalente, c’est à dire en intégrant l’amélioration qualitative (superficie, confort…) du parc de logements français.
Elle a eu lieu en dépit de périodes de baisse constatées en 1980-1985, 1992-1998, 2007-2009 et 2011-2015.
Précision : ceci est une réalité macro-économique historique. Ce n’est évidemment en aucun cas une garantie que le bien que vous allez acheter va s’apprécier mécaniquement. Cette hausse tendancielle masque de relativement courtes périodes (5 ans maximum) de baisse de l’indice des prix ainsi que des disparités locales fortes, notamment entre les grandes métropoles (qui ont concentré l’essentiel de la hausse des prix en France depuis 20 ans) et les petites villes.



Source: J. Friggit, INSEE, données notariales
En conclusion, la crise actuelle et la possible correction des prix à court-terme ne remettront pas en cause, selon moi, la hausse tendancielle long-terme de l’indice des prix. Cette dernière repose en effet sur des tendances de fond : hausse de la population, augmentation du revenu disponible des ménages, concentration urbaine, dé-cohabitation.
Pour une analyse approfondie des évolutions du marché de l’immobilier en France depuis 1960, des causes de l’envolée des prix à partir de la fin des années 1990 et des scénarios à moyen-terme, vous pouvez lire ici mon analyse détaillée sur le sujet.
Moins-value : comment limiter au mieux le risque ?
Achetez en dessous du marché.
Cela peut paraître évident mais dans la réalité, très peu d’investisseurs ont cette rigueur et beaucoup se précipitent sur la ou les premières opportunités offrant une rentabilité alléchante.
Conseil : achetez entre 5% et 20% en dessous du prix du marché. Cela implique bien entendu de savoir très bien négocier et implique de « laisser filer » un taux très important d’opérations qui ne rentrent pas dans ce critère très simple. Cela passe également par des investissements incluant un montant important de travaux de rénovation de biens immobiliers sous-évalués.
Il existe une multitude de manières d’acheter en dessous du marché, que je détaillerai dans un prochain article.
Ce prix de marché n’est pas toujours si simple à estimer. Une bonne approximation, à défaut d’avoir l’expérience du terrain, est le prix des dernières ventes données par le site des Notaires de France ou l’ordre de grandeur donné par le site MeilleursAgents. Attention dans ce dernier cas à vous renseigner pour connaître le niveau de confiance sur les prix donnés et s’il s’agit d’un prix net vendeur (ce qui est les cas généralement).
Conseil : le meilleur outil, à mon sens, pour une estimation fine du prix de marché des logements est l’application ETALAB fournie par la direction interministérielle du numérique. Il donne les montant des dernières transactions, quartier par quartier.



Ainsi, quand bien même les prix de l’immobilier dans votre secteur baisseraient ponctuellement de 5% ou 10%, vous auriez toujours une plus-value latente sur votre bien.
Une excellente connaissance du marché local, acquise en multipliant les visites de biens et de quartiers ainsi qu’en multipliant les offres, reste néanmoins indispensable.
Achetez en dessous du coût de construction.
Dans certaines de mes opérations et de celles que j’ai réalisées pour mes clients, le prix d’achat est significativement en dessous du coût de construction (entre 1 200€/m2 et 1 500€/m2 selon la région). Autrement dit, l’incitation pour les promoteurs à la création de nouveaux logements est nulle. Pas de risque, dans ces conditions, qu’un surplus d’offres de logements vienne dégrader le prix de votre bien.
Ciblez des villes avec de nombreux attraits forts.
Je conseille de cibler les villes avec au moins 3 attraits parmi les 6 suivants :
- >60 000 habitants
- présence d’importantes infrastructures de transport (port, axes autoroutiers, gare TGV…)
- pôle d’emplois (siège de grandes entreprises, établissements publics….)
- démographie stable ou en augmentations sur 20 ans
- proche de Paris (à <50 mn en transport d’une gare principale) ou de l’une des trois plus grandes villes françaises (<40 mn en transport d’une gare)
- prix (très) bas : 800€/m2 < prix FAI < 1800€/m2
Achetez dans un excellent emplacement par rapport à votre stratégie.
Achetez un bien situé dans un excellent emplacement au regard de votre stratégie locative. Si vous optez par exemple pour la location d’appartements en colocation pour étudiants, ciblez un bien à moins de 15 minutes à pieds ou en transport d’un pôle universitaire.
Si vous optez pour de la location classique, un bien situé en centre-ville à proximité des commerces, lieux de vie et transports en commun est généralement un emplacement recherché. Cela ne remplace bien évidemment pas une analyse approfondie de votre marché local et des quartiers les plus attractifs. Ces derniers ont le plus de valeur et subiront moins fortement les effets d’une éventuelle dépréciation conjoncturelle des prix dans votre région d’achat.
Accessoirement, un bon emplacement vous permettra de mieux louer et donc de mieux absorber une éventuelle baisse de prix à court terme.
Achetez à un prix historiquement bas dans la ville que vous ciblez.
A défaut d’informations suffisantes sur l’évolution des prix sur 20 ou 30 ans, évitez d’investir dans les villes/quartiers où les prix de l’immobilier ont augmenté depuis plus de 20 ans beaucoup plus rapidement que le revenu moyen des ménages français.
Les analyses de l’économiste J. Friggit (issues de publications pour l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées) mettent en lumière, à partir de 2000, la hausse rapide de l’indice du prix des logements anciens en France rapporté au revenu disponible des ménages. En particulier à Paris et Lyon. En clair, après 40 ans de stabilité, le pouvoir d’achat immobilier des ménages français (et en particulier des parisiens et lyonnais) a fortement baissé depuis ces 20 dernières années malgré la baisse des taux.
Un lyonnais doit en 2020 s’endetter sur près de 40 ans pour acheter le même bien qu’il achetait en 2000 en s’endettant sur 15 ans. Cette tendance n’est pas durable, à moins de prévoir une forte hausse du revenus moyen des ménages français. Elle peut en revanche présager d’une stagnation ou d’un replis des prix à moyen terme dans ces villes.
L’observation reste la même pour d’autres grandes métropoles françaises comme Rennes, Nantes ou Bordeaux où les prix se ont augmenté ces dernières années bien plus rapidement que le revenu disponible des ménages.
En clair, “troquer” de la rentabilité à court terme dans l’espoir d’une plus-value à moyen terme (ce qui est implicitement la stratégie des investisseurs à Paris, Lyon ou Rennes qui acceptent une rentabilité brute très faible de 3 ou 4% dans l’espoir d’une plus-value), me paraît bien hasardeux. Je le déconseille personnellement.
Entretenez votre bien.
Entretenir votre bien régulièrement (réparations “au fil de l’eau”, entretien régulier des parties communes, entretien/rénovation des appartements, révision régulière de toiture…) est nécessaire pour éviter qu’il ne se déprécie.
Ce n’est pas un bon calcul de limiter les dépenses d’entretien car le coût final à la revente (en manque à gagner sur le prix de vente final) serait bien supérieur au total des dépenses que vous auriez dû engager. Sans compter l’impact négatif d’un bien déprécié sur les loyers.
Explosion coût ou délais des travaux
L’impact d’une hausse du coût ou des délais de travaux sur votre rentabilité est évidente.
Quelques retours d’expérience pour limiter au maximum ce risque :
- ne faites pas vos travaux vous-mêmes (même les petits entretiens) ;
- acceptez de payer le prix juste en passant par des professionnels (trop rogner sur les prix des travaux est rarement un bon calcul à terme) ;
- vérifiez que l’artisan a bien une assurance de responsabilité civile décennale (*) ;
- vérifiez la solvabilité de l’artisan et privilégiez des entreprises que l’on vous a recommandées (votre agence vous en recommandera) ;
- pour les travaux de rénovation intérieur : sollicitez les services d’un architecte, qui choisira des artisans expérimentés, fera la négociation des devis et le suivi des travaux ;
- ne payez pas plus de 30% d’acompte sur vos travaux et gardez au moins 20% du prix total des travaux payable à la livraison définitive.
Conseil : ne cherchez pas à tout prix l’économie sur les travaux. Consultez plusieurs entreprises, négociez dans la limite du raisonnable mais ne faites pas de compromis sur la qualité. Vous risqueriez de devoir reprendre ou de ne pas avoir le niveau de qualité souhaitée.
(*) Communément appelée ‘garantie décennale’, elle garantit la réparation des dommages survenus après la réception des travaux. Note importante : vous pouvez mobiliser la garantie décennale même si l’entreprise qui a réalisé les travaux a déposé le bilan. Sachez par ailleurs que la mention de l’assurance, les coordonnées de l’assureur, la couverture géographique du contrat ou de la garantie doivent obligatoirement être mentionnés sur la facture.
Vices cachés et autres défauts découverts après l’achat
Découvrir un défaut majeur après l’achat est la hantise de nombreux aspirants investisseurs. Sachez, en préambule, que la garantie décennale décrite plus haut courre toujours en cas de changement de propriétaire. Vous pourrez la solliciter librement pendant toute la période décennale.
Afin de limiter le risque de mauvaises surprises:
- soyez très attentifs lors des visites et faites-vous si besoin accompagner par un professionnel. Notamment :
- demandez à voir les caves pour détecter les éventuels problèmes d’humidité ;
- inspectez l’état de la toiture et des gouttières (allez voir les combles ou par la fenêtre du dernier appartement). Demandez les dernières factures de révision de toiture ou l’âge de la toiture ;
- observez les signes de détérioration sur les façades (fissures, pierres abimées ou cassées…). A terme, si elles ne sont pas réparées, elles vont causer des infiltrations dans vos logements et des coûts additionnels ;
- soyez très attentifs à tous les indices d’infiltration d’eau (moisissures au mur, peinture gondolée).
- lisez attentivement les diagnostics techniques, notamment sur les installations électriques ou de gaz. Demandez au vendeur de mettre en conformité les installations avant la vente en cas d’anomalies. Egalement, demandez si le système d’évacuation est bien conforme. S’il ne l’est pas, demandez la mise en conformité avant la vente. Demandez à votre notaire d’inscrire ces éléments en conditions suspensives de vente sur le compromis;
- demandez à visiter tous les lots et également l’ensemble des parties communes et éventuelles annexes de locaux commerciaux.
Si, malgré vos meilleurs efforts, un défaut est découvert après l’achat, vous pouvez dans certains cas établir l’existence d’un vice caché. Il s’agit un défaut connu du vendeur, non-identifiable lors des visites du bien et dont l’existence n’a pas été portée à la connaissance de l’acquéreur.
Conseil : dans cette situation, vous devez rassembler les “preuves” à votre disposition. Si besoin en vous appuyant sur le témoignage écrit d’un locataire. Ensuite, estimez le montant de votre préjudice (notamment en obtenant un devis pour la réparation du problème constaté) et contactez immédiatement le vendeur pour proposer une résolution à l’amiable de votre préjudice. Si vous alliez en justice, et si vous obteniez gain de cause, l’ensemble des frais engagés seraient à la charge du vendeur. Il aura tout intérêt à trouver un accord amiable avec vous.
Je vous conseille également d’en parler à votre notaire qui pourra vous apporter son aide dans la résolution de ce problème.
De manière générale, un acheteur, surtout s’il est particulier, est très protégé en France. Un vendeur gagne rarement à cacher délibérément des défauts. En revanche, il est de votre responsabilité de bien identifier les défauts visibles du bien pour évaluer le coût de réparation, établir votre besoin de financement et négocier votre offre d’achat.
Conclusion
La perception des risques associés à l’investissement locatif et à l’immobilier en général me semble faussée, alimentée par différents biais cognitifs et les récits catastrophés que l’on peut entendre ça et là.
Il y a évidemment des risques importants lors d’un investissement locatif, que la crise actuelle va accroître ponctuellement. Mais, pour y faire face, il me semble plus intéressant de les identifier et de les quantifier pour les inclure dans vos prévisionnels que de rester au stade de la crainte paralysante. D’autant plus que ces risques, en ce qui concerne l’immobilier d’habitation, resterons limités en France et qu’il existe une multitude d’actions possibles pour les réduire d’avantage.
Quoiqu’il en soit, investir dans des quartiers attractifs, acheter à des prix bas, exiger une rentabilité élevée, faire des rénovation et des aménagements intelligents, proposer des biens de qualité, diversifier son patrimoine….est plus que jamais la meilleure manière de se prémunir contre ces différents aléas.