Stratégie d'investissement

Coronavirus: quelles conséquences pour l’investissement locatif ?

Impact de la crise du coronavirus sur l'investissement locatif

Des dégâts déjà considérables et une visibilité encore incertaine

Une récession mondiale, avec des disparités selon les secteurs et les régions

La crise sanitaire liée à la propagation du Coronavirus et, en réaction, la généralisation des mesures de confinement, ont progressivement paralysé l’ensemble des économies mondiales depuis le premier trimestre 2020.

Selon les prévisions du Fond Monétaire International (FMI) du 15 avril 2020, le PIB mondial devrait connaître une récession de 3% en 2020. Cette prévision, qui figure dans un rapport détaillé sur les perspectives de l’économie, est 6 points inférieure à celle annoncée par le FMI début 2020 avant la crise.

“​Il est très probable que l’économie mondiale connaisse cette année sa pire récession depuis la Grande Dépression, soit une récession plus grave que celle observée lors de la crise financière il y a une dizaine d’années.

FMI

De grandes disparités devraient êtres observées selon les régions. Tandis que la Chine, moteur de la croissance mondiale depuis près de 20 ans, devrait connaitre une croissance très faible, la plupart des économies des pays développés (Etats-Unis, France, Allemagne, Royaume-Uni, Japon…) devrait enregistrer une importante contraction de leur PIB.

D’après le Financial Times, les économies de la zone UE devraient connaitre une récession de l’ordre de 6% en 2020, avec une explosion du chômage et une baisse du revenu par habitant.

En France, la croissance devrait être de -8% en 2020, soit 3 fois moins que lors de la crise mondiale déclenchée en 2007 avec l’explosion de la bulle des « subprimes » aux Etats-Unis.

Les répercussions varient selon les secteurs d’activités. En particulier: le secteur aéronautique, automobile, le tourisme, le commerce de détail, la restauration, sont déjà très lourdement affectés du fait de l’effondrement de la demande.

Un effondrement des marchés actions

L’ampleur de la contraction de l’économie a fait décrocher de plus de 20 % les marchés aux Etats-Unis et en Europe au terme du premier trimestre 2020. 

Le CAC 40 a perdu, le 20 avril 2020, 25% de sa valeur par rapport à son niveau d’avant crise. L’indice S&P 500 qui couvre environ 80 % du marché boursier américain par sa capitalisation, est en repli de 15% au 20 avril 2020 par rapport à son niveau d’avant crise, bénéficiant d’une forte reprise depuis fin mars.

Une rechute, à la date de rédaction de cet article n’est pas exclue, si une sortie de la crise sanitaire n’est pas trouvée rapidement. D’autant qu’un certains nombres d’éditorialistes dont je partage l’opinion, estime que les marchés actions semblent portés à ce jour par un relatif optimisme alimenté par les annonces de plans de soutien massifs par les banques centrales. A titre de comparaison, les marchés aux Etats-Unis et en Europe avaient chuté de plus de 50% entre juillet 2007 et mars 2009.

En réaction à cette crise: des plans de relances immédiats et massifs

Face à l’ampleur de la récession économique annoncée, les principales banques centrales et Etats ont réagi rapidement et de manière massive.

La Banque Centrale Européenne (BCE) a ainsi annoncé un plan de soutien de 750 milliards d’euros le 21 mars dernier. Sa présidente, Christine Lagarde, a précisé que l’institution européenne ferait tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir l’économie de l’union européenne et qu’il n’y aurait « pas de limite » au soutien de l’économie.

Cela se traduira concrètement pas des rachats massifs de dettes publiques (obligations d’Etat) et privées et une injection massive de liquidités pour soutenir l’économie. La banque centrale américaine (FED) a déjà débloqué un plan de soutien de plus de 2 000 milliards de dollars et les autres banques centrales ont également pris des mesures de soutien historiques.

Les Etats agissent en relais de ces plans de relance. En France, le gouvernement a déjà annoncé plusieurs mesures de soutien aux entreprises (report de charges, chômage partiel, prêts garantis…) et aux particuliers.

Une sortie de crise encore imprévisible

La principale inconnue reste la résolution de la crise sanitaire (contenir le nombre de cas graves) et la fin des mesures généralisées de confinement qui en dépendent.

Selon le FMI, si les mesures de confinement devaient se prolonger au délà du deuxième trimestre ou si une deuxième vague de contamination du Covid-19 devait déferler fin d’année ou en 2021 sans possibilité de vaccin, « le choc sur l’économie mondiale serait deux fois plus important »…

Coronavirus : quelles conséquences immédiates pour l’immobilier locatif ?

L’immobilier locatif englobe une grande diversité d’activités.

L’immobilier commercial : grand perdant de la crise

Dans la lignée de l’annonce du gouvernement italien le 11 mars 2020, les Etats européens ont rapidement décrété la fermeture des commerces, exceptés ceux liés à l’alimentaire ou à la santé.

En conséquence de ces pertes de revenus brutaux, la France a autorisé le report des loyers, occasionnant un manque à gagner immédiat pour les propriétaires de locaux commerciaux. La réouverture des commerces à partir de mai 2020 devrait être partielle et progressive en France et il est déjà certain qu’un grand nombre de commerces en difficulté ne seront pas en mesure d’honorer le paiement des loyers reportés, ce qui se traduira par des pertes définitives pour les bailleurs commerciaux.

L’action d’Unibail-Rodamco-Westfield, premier groupe coté de l’immobilier commercial au monde, a ainsi vu son cours en bourse s’effondré de plus de 60% (date au 22 avril 2020) par rapport à son niveau d’avant crise.

Cours action Unibail-Rodamco-Westfield
cours action Unibail-Rodamco-Westfield le 22 avril 2020, google Finance

Note : un grand nombre de propriétaires d’immeubles de rendement constitué d’un local commercial ont observé un gel de versement des loyers. C’est une des raisons pour lesquelles je recommande d’être vigilant lorsque vous songez à investir dans un immeuble de rendement avec un local commercial. Une autre raison est la vacance locative généralement un peu plus élevée sur les commerces. Ce risque accru doit vous amener à exiger un niveau de rentabilité locative plus importante pour les locaux commerciaux. Je vous conseille par ailleurs de ne pas investir, sauf exception, dans les immeubles de rendement dans les locaux commerciaux sont vides ou dont le bail arrive à son terme dans les 12 mois post vente. Dans tous les cas, si vous n’êtes pas accompagné ou si vous n’avez pas de première expérience en investissement locatif, je déconseille fortement de cibler un immeuble mixte (habitation + local commercial) pour l’achat de votre premier immeuble.

L’immobilier de bureaux également impacté

La plupart des entreprises ont vu leur activité ralentir fortement du fait de l’effondrement généralisée de la demande. Les petites entreprises, en particulier, connaissent actuellement des problèmes de trésorerie importants.

Ainsi, selon une enquête de la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) publiée le 17 avril 2020, plus de la moitié des dirigeants de micro-entreprises (les TPE de moins de dix salariés) et PME (entreprises de moins de 500 salariés) en France craint la faillite.

Ces difficultés financières et la possibilité de report de loyers font peser un risque accrue sur l’immobilier de bureaux. Le Président de Corum L’Epargne, Frédéric Puzin déclarait ainsi dans une lettre adressée aux associés de ses SCPI le 19 mars 2020 : “pour la première fois depuis 9 ans, nous aurons des difficultés cette année à tenir tous nos objectifs.”

Conclusion : les mesures de soutien aux entreprises annoncées par le gouvernement français (report d’échéances sociales et fiscales, remise d’impôt, report de paiement de factures d’électricité, prêts garantis, Fond de Solidarité pour les TPE, dispositif de chômage partiel…) ne suffiront pas à contenir l’impact de la crise sur la trésorerie des entreprises. Pour les commerces, les dégâts sont déjà considérables. Si les loyers reportés sont finalement honorés fin 2020, les conséquences devraient être limitées. Néanmoins, le nombre de faillites parmi les TPE devrait bondir cette année et occasionner des pertes définitives de loyer et une tension accrue pour l’immobilier professionnel (commercial et de bureaux).

L’immobilier locatif résidentiel (hors touristique) devrait le mieux résister à la crise actuelle

Note : nous traitons ici le cas de l’immobilier résidentiel, c’est à dire hors immobilier touristique. Ce dernier est déjà pour des raisons évidentes dans une situation très compliquée.

La besoin de logements en France, en volume, n’a pas baissé du fait de la crise. Les locataires ont toujours besoin de se loger.

Les conséquences immédiates de la crise pour les investissements locatifs résidentiels sont doubles.

  1. Hausse de la vacance locative en raison de l’impossibilité de remettre en location les logements vacants du fait des mesures de confinement.
  2. Gel des travaux (que ce soit la rénovation ou le simple rafraichissement de logements), ce qui alimentera in fine la hausse de la vacance locative.

En ce qui concerne l’impact pour les propriétaires des impayés de loyers dus à la crise, il devrait être relativement limité en France, pour plusieurs raisons.

  1. Les aides publiques (CAF, Visale, APL, FSL..) représentent une part importantes des loyers. Cela limite in fine l’exposition des propriétaires aux impayés.
  2. Les mesures de soutien aux particuliers (chômage partiel, report de paiement des factures de consommation courante…) vont amortir l’effet conjoncturel immédiat de cette baisse de revenu.
  3. De nombreux propriétaires bénéficient d’une assurance loyers impayés. Je la recommande personnellement pour les primo-investisseurs ou pour les investisseurs qui n’ont pas un portefeuille de biens suffisamment diversifié (moins de 10 lots).

Conseil : lorsque vos potentiels locataires sont éligibles, pensez à demander une garantie VISALE. Il s’agit d’un dispositif public financé par Action Logement qui agit comme garant pour couvrir les loyers impayés et les dégradations locatives. La demande doit être faite par le locataire avant la signature du bail. Assez méconnue, elle est pourtant rapide et gratuite (aussi bien pour le locataire que le propriétaire). Sont éligibles tous les locataires de moins de 30 ans et les salariés en contrat de travail depuis moins de 6 mois. A choisir, je privilégie systématiquement la caution Visale, publique, à une garantie personne physique. En période de crise, son intérêt est évident.

Pour rappel, le taux d’impayés de loyer de plus de 3 mois en France sur le parc privé était de 4,5% en 2017, selon les derniers chiffres de l’étude sur le logement publiée par l’INSEE. En 2008 pendant la dernière crise économique majeure, le taux d’impayés de loyers était de 5,4%, atteignant un point haut à 6,7% en 2010. Ce qui reste modéré. Les dispositifs de protection et de garantie sociales, caractéristiques du modèle français, jouent pleinement leur rôle d’amortisseur de crise pour les locataires qui sont sont statistiquement parmi les ménages les plus défavorisés (jeunes, salariés précaires).

Conclusion: plus que jamais, la situation actuelle montre l’importance d’être extrêmement rigoureux et exigeants dans vos investissements locatifs, notamment en terme de rentabilité locative. Une rentabilité locative élevée (>7,5%), qui implique généralement de faire des acquisitions en dessous du marché, permet d’amortir et d’affronter les aléas conjoncturels avec plus de sérénité.

Coronavirus: conséquences à court-terme (2 ans) pour l’investissement locatif

Loyers

En France, on observe depuis 1960 une évolution de l’indice des loyers en lien avec le revenu disponible des ménages. Ce qui est conforme à l’intuition: avec la hausse du revenu disponible (tendance longue depuis 1960), les ménages ont proportionnellement plus de budget à allouer aux dépenses de logement.

A contrario, la récession à venir (à minima -8% en 2020 en France) accompagnée d’une forte hausse du taux de chômage va, à court-terme, peser à la baisse sur les loyers. Un recul de l’indice des loyers est donc possible, bien qu’il ne soit pas encore certain. En 2008-2010 pendant la dernière crise économique majeure, il était resté stable.

Prix

En ce qui concerne le prix de l’immobilier, on devrait observer à court-terme un recul en lien avec les pertes de revenus des ménages et un possible effet de correction plus marquée dans certaines grandes métropoles où les prix sont à des niveaux historiquement très élevés, dopés par l’allongement de la durées des emprunts depuis et l’abaissement des taux depuis 20 ans. Entre 2008 et 2010, l’indice des prix de logements anciens en France avait ainsi reculé d’environ 7%.

Une analyse plus approfondie des évolutions du marché de l’immobilier en France depuis 1965 est disponible ici.

Comme on l’a observé pendant la crise de 2008, je pense que la correction à court-terme des prix pourraient être plus forte que celle des loyers, pour plusieurs raisons.

  1. Anticipant une baisse possible des prix, les primos accédants et investisseurs vont très probablement reporter leur décision d’achat, ce qui accentuera la baisse (anticipation auto-réalisatrice).
  2. Les mesures publiques de soutien aux particuliers et aux entreprises sont essentiellement des mesure de soutien à la trésorerie qui vont d’avantage soutenir les dépenses courantes (dont les loyers) que les investissements.
  3. La forte hausse du chômage prévue en 2020 (qui devrait se prolonger en 2021) et la baisse du revenu disponible des ménages va dégrader le niveau de solvabilité et donc la capacité d’endettement des français. Ce qui devrait freiner l’accès à la propriété et accroître la proportion de locataires.
  4. Contrairement aux prix, les loyers sont restés historiquement à un niveau cohérent avec celui du revenu disponible des ménages (moindre risque d’une correction importante).

En cas de correction des prix plus forte que celle des loyers (ce que je pense pour les raisons évoquées ci-dessous), le niveau moyen de rentabilité locative pour les investisseurs devrait s’améliorer et offrir de belles opportunités. A condition d’anticiper de limiter au maximum le risque de vacance locative et d’impayés (qui devraient augmenter), de négocier intelligemment et que votre situation financière n’ait pas été trop dégradée.

Coronavirus: conséquences pour les projet d’investissements locatifs en cours de signature

Cas 1 : le compromis de vente n’a pas encore été signé

C’est le cas de deux immeubles de rendement que j’ai négociés pour des clients quelques semaines avant les mesures de confinement et pour lesquels la signature du compromis de vente a été suspendue. Dans ce cas, il est relativement aisé de vous rétracter, en particulier si vous êtes acheteur particulier. Il vous suffirait techniquement de signer le compromis et de bénéficier du délai de rétractation de 10 jours. Si vous achetez en SCI et que vous souhaitez bénéficier de ce délai, pensez à prévoir une clause de substitution.

Si votre dossier de financement est toujours validé par la banque, je vous conseille vivement de re-négocier le prix de vente. Le nombre d’acheteurs dans les mois à venir va considérablement diminuer. Vous vous serez en position de force.

Cas 2 : le compromis de vente a été signé

Dans ce cas, et si la crise actuelle n’a pas impacté votre enveloppe de financement, pas de précipitation. Prendre possession de votre bien en pleine période de confinement serait très préjudiciable, notamment si un ou plusieurs lots sont vacants.

Si votre demande de financement a pris du retard, je vous conseille de demander au vendeur un délai supplémentaire pour la signature, le plus long possible. Dans l’idéal, visez une signature de vente à partir de début septembre, surtout si les lots sont vides.

Si vous ne connaissez pas la situation locative actuelle dans le bien que vous êtes en train d’acheter, essayez de l’obtenir auprès de votre vendeur.

Dans le cas où la crise rendait votre projet très risqué (rentabilité de votre projet déjà faible et lots non-loués ou achat d’un local commercial ou bureau non loué) : envisagez d’annuler la vente. En fonction des clauses prévues dans le compromis, un ou deux refus bancaires peuvent vous permettre de demander l’annulation de la vente.

Conclusion

Conséquence du replis probable des prix dans de nombreuses villes, le second semestre 2020 et 2021 devraient permettre aux primo-investisseurs avec une situation financière stable de faire de belles opportunités d’investissement. D’autant plus que les taux vont rester bas pendant encore quelques années, tant que le risque de récession ne sera pas totalement dissipé.

En ce qui concerne votre stratégie d’investissement, la crise actuelle doit être une incitation à privilégier la rentabilité locative et à limiter les risques locatifs (voir mon article sur le sujet). En cas de difficultés conjoncturelles (vacance, impayés) avoir une rentabilité élevée (rentabilité brute >7,5%) permet de mieux absorber les chocs.

Au sujet de l'auteur

Thomas (fondateur)

J'achète des immeubles de rapport depuis 2017. Dans des villes secondaires attractives et à haut rendement (Le Havre, Le Mans, Calais, Boulogne-sur-Mer, Mulhouse, Dunkerque....). J'ai fait l'acquisition en septembre 2023 de mon 12e immeuble de rapport.

Depuis 2019, je propose à mes clients particuliers des investissements locatifs clés en main. Avec une spécialisation sur les immeubles de rapport, dans les villes où j'investis personnellement depuis plusieurs années.

En faisant bénéficier à mes clients de mon expérience d'investisseur bâtie sur le terrain.

Mon accompagnement :
- conseil sur la recherche de financement et la fiscalité du montage,
- 'sourcing' et négociation du bien,
- estimation des travaux,
- conseil sur la rédaction du compromis,
- suivi et réalisation des travaux,
- passation avec une agence locative de confiance.