La rentabilité est l’indicateur le plus souvent utilisé pour calculer la performance anticipée ou constatée d’un investissement locatif. Elle s’exprime en taux (pourcentage). Elle est le ratio entre les revenus générés par un actif économique et le coût d’acquisition de cet actif.
En ce qui concerne l’investissement locatif, on distingue plusieurs indicateurs de rentabilité.
Rentabilité brute
La rentabilité brute d’un investissement locatif est la rentabilité avant paiement de l’ensemble de vos charges locatives. Son calcul est le suivant :
Taux de Rentabilité Brute = loyers / Coût Acquisition (*)
(*) Coût acquisition = prix du bien frais d’agence inclus (prix FAI) + frais de notaire + travaux
Rentrons dans le détail du calcul.
Loyers
Il faut prendre les loyers hors charges du locataire (eau collective, taxe d’ordures ménagères, entretien chaudière…). Vous les percevrez tous les mois mais vous devrez les reverser dans l’année. Ce n’est pas à proprement parler un revenu, ni pour vous, ni d’ailleurs pour les services fiscaux. Ces charges vont fausser vos calculs et votre réflexion. Retraitez-les donc impérativement des loyers.
Note : l’idéal est de limiter au maximum le montant des charges locatives que vous versent le locataire. Cela complique inutilement votre suivi de trésorerie et dans certains cas peut vous faire porter un risque additionnel dans le cas où la provision de charges indiquée sur le bail ne couvre pas les charges réelles. Par exemple, dans le cas d’un compteur d’eau collectif et d’un bail avec un forfait de charges de 30€ par mois, si votre locataire consomme plus de 30€ de charges, vous allez devoir payer la différence. Avoir des compteurs (électriques, eau) individuels pour vos appartements est un vrai avantage, en ce qu’ils responsabilisent vos locataires en leur faisant assumer le coût d’une éventuelle sur-consommation.
Coût d’acquisition du bien.
Je vous conseille de le calculer frais d’agence et frais de notaire inclus. Les frais d’agence peuvent varier en fonction du prix du bien ou de la négociation que vous pouvez obtenir. Il est donc préférable de les inclure dans le prix. Pensez bien à inclure, comme dans la définition ci-dessus, les éventuels coûts des travaux.
Travaux.
Si vous avez acheté un appartement 100 000€ FAI et que vous avez réalisé 20 000€ de travaux, c’est, d’un point de vue patrimonial, comme si vous l’aviez acheté 120 000€ FAI. A la différence que vous avez payé les frais de notaire sur une base de 100 000€ et non de 120 000€ et que vous espérez, si les travaux ont été réalisés intelligemment, que votre bien a ainsi pris de la valeur.
Dans tous les cas, il est indispensable de garder les mêmes modes de calcul lors de vos calculs de rentabilité, pour ne pas fausser votre réflexion.
Rentabilité nette
Définition
La rentabilité nette d’un investissement locatif est la rentabilité après paiement de l’ensemble de vos charges locatives. Son calcul est le suivant:
Taux de Rentabilité Nette = loyers – total charges (*) / coût acquisition = 6,5%
La rentabilité nette est un indicateur plus précis mais moins utilisé en pratique. En effet, mis à part la taxe foncière qui peut varier significativement selon la localité d’achat, la rentabilité nette est généralement une proportion constante de la rentabilité brute.
En moyenne, la rentabilité nette représente en effet environ 75% de la rentabilité brute.
Quelles charges à déduire ?
(*) Les charges qui viennent en déduction des loyers pour le calcul de la rentabilité nette sont :
- les charges de gestion locative (compter entre 4% et 7% des loyers perçus hors charges) ;
- les frais d’assurances obligatoires (propriétaire non-occupant) ;
- les frais d’assurance complémentaires (assurance vacance locative, assurance loyers impayés);
- la taxe foncière ;
- les charges locatives non-récupérables, c’est-à dire celles qui ne peuvent pas être répercutées au locataire dans les charges locatives. Il s’agit du prorata (ou de la totalité dans le cas de l’investissement dans un immeuble de rapport) des charges d’entretien (toiture, façade, équipements des parties communes…) et de gestion de l’immeuble (frais de surveillance de l’immeuble par exemple).
Exemple
Faisant appel à mes services, Quentin a acheté en 2019 un premier immeuble de rapport au prix de 250 000€ FAI. Nous avons réalisé 15 000€ de travaux pour rénover deux appartements et transformer le troisième en T2, en vue de louer deux chambres en colocation et augmenter ainsi les revenus locatifs. Conservateur, j’avais estimé les revenus locatifs annuels à 24 000€/an.
Au final, en raison d’une vacance locative plus faible que prévue et d’un montant de loyer plus élevé que dans mes estimations (grâce au positionnement haut de gamme de l’appartement et à sa re-configuration), Quentin a perçu sur la première année de mise en location 24 800€ de revenus locatifs.
- Rentabilité brute estimée: 24 000€ / 295 000€ = 8,1%
- Rentabilité brute réelle (ou constatée): 24 800€ / 295 000€: 8,4%
En 2019, il a payé (charges):
- Taxe foncière : 2 480€.
- Frais de gestion locative à 6% : soit 1 488€.
- Assurance Propriétaire non-occupant (obligatoire) : 550€.
- Assurance Loyers impayés à 2,5% : 620€.
- Charges d’entretiens : 450€.
Total charges : 5 588€
- Taux de Rentabilité nette = ( loyers – total charges ) / coût acquisition = 6,5%
Rentabilité nette nette
On peut calculer une rentabilité nette nette, qui est la rentabilité de votre investissement locatif après impôt.
Dans le cas de Quentin, il a suivi mon conseil et a choisi le régime fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP). Son impôt sur ses revenus fonciers (desquels il a pu notamment déduire l’amortissement de son bien ainsi que les travaux) est de 2 600€.
Taux de Rentabilité Nette Nette = (loyers hc – total charges – impôt) / coût acquisition = 5,6%
Note : la taxe foncière est calculée en appliquant un taux d’imposition (qui dépend de la commune) au revenu cadastral. Le revenu cadastral tient compte des différentes charges telles que l’amortissement, l’assurance, l’entretien, la gestion du bien et est égal à 50% de la valeur locative cadastrale. Cette dernière est la valeur locative théorique du bien. Elle est définie par le législateur et correspond à une année de loyer. Taxe Foncière = Loyers théoriques annuels * 0,5 * taux TF dans la localité
Différence entre rendement et rentabilité
Le traitement des plus et moins-values
Une définition financière stricte de la rentabilité d’un actif inclut les éventuelles plus ou moins-values latentes ou de cession.
En ce qui concerne la rentabilité locative d’un bien immobilier, par abus de langage autant que par simplicité, on associe souvent la rentabilité locative ou rendement locatif, qui ne prend en compte que les revenus locatifs.
Dans mes articles et sauf précision contraire, c’est cette définition simplifiée de la rentabilité locative que je prendrai. Il n’est en effet pas toujours facile, voire impossible, d’estimer l’évolution du prix de votre bien et les plus-ou moins values associées.
Exemple
Vous achetez un appartement 100 000€. Les revenus locatifs en année 1 sont de 5 000€ mais le bien perd 10% de sa valeur. Quelle est la rentabilité de cet investissement en année 1 ?
(Revenus + Moins Value) / Prix du Bien = -5%
D’où l’importance cruciale de bien acheter et de prendre en compte ce critère dans votre réflexion d’achat et votre calcul de rentabilité.
Si le bien n’a pas été cédé, on parle alors de plus-value latente, calculée sur la base des dernières estimations de prix de votre bien immobilier ou des dernières transactions dans votre quartier. Pour cela, je vous conseille le site très intéressant https://barometre.immobilier.notaires.fr/ qui vous donnera le prix des dernières ventes, zone par zone.
Note : si vous investissez aujourd’hui dans les villes où les prix de l’immobilier ont augmenté très fortement ces dernières années (Rennes, Lyon, Bordeaux, Paris…), vous intégrez implicitement l’hypothèse que les prix vont continuer de croître au rythme observé depuis 25 ans. Ceci afin de réaliser une importante plus-value de cession qui compensera le faible rendement locatif, dû précisément au fait que les prix sont déjà à des niveaux très élevés. Or cette évolution, dé-corrélée de celle du revenu disponible des ménages, n’est pas durable. Sur ce sujet important, je vous recommande de lire mon analyse sur l’évolution des prix de l’immobilier en France depuis 1965 et en particulier depuis la fin des années 1990.
Rentabilité théorique et rentabilité constatée
Des écarts potentiellement importants
Important: lorsque l’on parle de rentabilité brute, on fait souvent référence à une rentabilité théorique. Celle que pourra vous indiquer le vendeur ou celle que vous pourrez estimer vous-même dans la phase de réflexion qui doit vous conduire ou non à l’achat.
Elle peut s’éloigner significativement de la rentabilité constatée (celle que vous allez réellement obtenir). Il faut donc bien évaluer les facteurs qui vont impacter cette rentabilité :
- vacance locative,
- impayés,
- retards de paiement,
- montant de loyers finalement plus bas que prévu…
Afin que les deux valeurs soient les plus proches possibles.
Le cas des logements vacants
Certains agents immobiliers (ou propriétaires d’ailleurs) vont également estimer le montant de loyer pour les logements vacants ou les surfaces à aménager.
Prenez avec beaucoup de précaution ces chiffres et testez les (annonces LeBonCoin par exemple). Ils seront dans presque tous les cas sur-estimés, parfois de beaucoup.
Le cas des logements déjà loués
A l’inverse, vous pourrez visiter des biens qui sont déjà loués. Dans ce cas, le calcul de la rentabilité théorique est plus fiable. Il suffit de prendre en compte le loyer hors charge en vigueur.
Mais même dans ce cas, soyez attentifs, le loyer pratiqué n’est pas nécessairement un loyer du marché.
Cela peut-être une aubaine si le loyer est en dessous du marché. Par exemples: le propriétaire n’a jamais revalorisé le loyer et le locataire est en place depuis plusieurs années, le propriétaire ne connaît pas bien les loyers du marché ou préférait louer volontairement sous le marché par peur de la vacance locative possible etc….
Méfiez-vous également des loyers excessivement élevés, notamment dans des villes où la tension locative est forte. Vous ne parviendrez pas nécessairement à maintenir ce niveau de loyer au départ du locataire et votre rentabilité s’en trouverait dégradée.
Si la rentabilité constatée est inférieure à la rentabilité estimée, il est indispensable de comprendre quels facteurs ont impacté négativement votre investissement et d’en tirer les bonnes conclusions pour la suite. L’investissement locatif est également un apprentissage sur la durée. Apprenez de vos erreurs.
Pièges à éviter : retraitement des charges
Certains agents immobiliers incluent les charges dans le calcul de la rentabilité locative (délibérément, par négligence ou parce qu’ils ne voient pas la raison de les retraiter). Cela leur permet de communiquer un meilleur taux de rentabilité, en améliorant virtuellement les montants de loyer.
N’oubliez pas que les agents sont des commerciaux rémunérés à la vente et vont faire la maximum pour embellir l’opération et vous inciter à l’achat. Peu de personnes le font, mais demandez systématiquement le détail des loyers et des charges pour retraiter ces dernières et être sûr d’avoir les montants corrects pour vos calculs.
Vous pouvez avoir une bonne idée des loyers du marché sur le site La Cote Immo. Mais attention, les loyers indiqués ici incluent les charges.
Conclusions
Un très bon indicateur pour débuter est le taux de rentabilité brute.
Selon votre stratégie d’investissement, vous devez viser entre 8% et >10% de rentabilité brute. En deçà, vous serez très certainement dans une opération à cash flow nets négatifs. Autrement dit, votre investissement ne sera pas totalement auto-financé (effort d’épargne). Je considère personnellement que c’est, dans ce cas, un mauvais investissement locatif, quelle que soit la localisation. C’est pourtant malheureusement l’essentiel des investissements pratiqués en France.
Le choix d’accepter une rentabilité brute faible au motif que le bien acheté devrait prendre de la valeur ou que le risque de vacance locative est faible est selon moi une quadruple erreur.
- L’appréciation d’un bien reste hypothétique à court-terme, surtout dans les grandes villes françaises où les prix de l’immobilier ont, depuis 20 ans, progressé bien plus rapidement que les revenus disponibles des ménages (cette tendance n’est pas tenable). En raison de la crise actuelle du Coronavirus et ces probables répercussions sur le marché immobilier, cette hypothèse est d’autant moins probable.
- Cela consiste à “troquer” un cash flow futur (plus-value) contre des cash flow immédiats (le supplément de loyers que vous percevriez avec une rentabilité plus élevée).
- Cela vous pénalisera pour enchaîner d’autres investissements locatifs puisque votre niveau de solvabilité bancaire sera fortement dégradé.
- Il est possible de trouver des villes, emplacements et typologies de biens offrant une très bonne rentabilité et une vacance locative tout aussi basse que dans les grandes villes françaises à faible rentabilité locative.