Cet article s’appuie sur les données reconstituées par le célèbre économiste J. Friggit (ingénieur au Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable). Il est une analyse des évolutions du marché immobilier français depuis 1965.
J’en décris les principales tendances, aussi bien en ce qui concerne les loyers que les prix des logements anciens, afin de remettre dans une perspective historique les évolutions récentes du marché immobilier français.
Je donne également des explications au changement important qui a eu lieu depuis 1997. A savoir une hausse du prix des logements anciens beaucoup plus rapide que celui du revenu disponible des ménages, à un niveau aujourd’hui encore anormalement élevé. Explications qui permettent de proposer des scénarios probables concernant l’évolution future des prix des logements et des loyers en France. Donnée importante pour la modélisation de rentabilité de votre investissement locatif.
C’est une grille d’analyse particulièrement utile dans le contexte général d’incertitudes liées à la crise du Coronavirus.
Note: le scénario moyen-terme que je retiens est celui d’un retour du prix des logements rapporté au revenu disponible des ménages à un niveau proche de leur niveau historique. Ce qui se traduirait concrètement, à revenu disponible constant, par une baisse de l’indice des prix en France. Rattrapage qui pourrait s’accélérer en cas de baisse significative et durable du revenu disponible des ménages français consécutivement à la crise actuelle.
Pour cette raison, j’étudie avec toujours beaucoup de prudence les investissements locatifs dans les plus grandes villes françaises où les prix de l’immobilier ont augmenté le plus fortement depuis 20 ans (à un rythme qui ne me semble pas tenable), et où les investisseurs acceptent une rentabilité très faible en contrepartie d’une perspective de plus-value importante. Ce qui est aujourd’hui selon moi de plus en plus hypothétique. Parier sur les loyers (et donc le rendement locatif), qui n’ont pas connu en France depuis 20 ans d’envolée comparable à celle des prix, me parait une stratégie beaucoup plus judicieuse. C’est la raison pour laquelle je conseille des investissements locatifs avec un fort rendement locatif. Ce qui implique souvent un prix d’acquisition faible (<1800€/m2). Investissements pour lesquels l’éventuelle plus-value long terme est la « cerise sur le gâteau » et non une nécessité.
Je précise que l’ensemble des analyses et prospectives macro-économiques sont données à titre de cadre de réflexion, en complément d’une analyse fine de votre marché local quartier par quartier et de ses spécificités propres.
Évolutions du marché immobilier français depuis 1965
L’observation de l’évolution des loyers et des prix d’acquisition se fait en base 100 en 1965 et à monnaie constante (c’est à dire net d’inflation). Les prix d’acquisition sont ceux des logements anciens.
Précisons par ailleurs que les indice de prix et de loyers, repris dans cet article, ont été calculés par l’économiste J. Friggit à partir des données INSEE et de bases de données notariale historiques. Précision importante: l’indice des prix mesure le prix des logements à qualité (confort, superficie) constante. Ainsi, par exemple, si les prix d’achat des logements anciens en France augmentent de 20% mais que la surface moyenne des logements acquis est 30% supérieure, l’indice des prix baissera sur la période. Traduisant en effet une baisse des prix à superficie constante. Il en est de même pour les loyers.
Analyse de l’évolution des loyers
L’indice des loyers en France a progressé à un rythme similaire à celui du revenu disponible des ménages.
Entre 1965 et 2018, l’indice des loyers a augmenté régulièrement, sur un rythme annualisé de +1%/an, comme le revenu disponible des ménages sur la période.
Ainsi, l’indice des loyers rapporté au revenu disponible moyen des ménages est globalement stable et oscille depuis 1975 de +/- 10% autour de son niveau de référence (choisi arbitrairement au premier trimestre 2000). C’est une évolution conforme à l’intuition : l’augmentation du revenu disponible augmente la capacité locative des ménages et tire les loyers à la hausse. Le fait que l’indice des loyers suit globalement l’évolution du revenu disponible des ménages indique par ailleurs qu’il n’y a pas eu de choc d’offre ou de demande de logements sur la période, c’est à dire une hausse ou une diminution majeure du parc de logements net de l’augmentation du nombre de ménages. C’est un point très important sur lequel on reviendra plus tard.
En parallèle : une hausse du poids du loyer dans le revenu moyen des locataires.
Sur la même période, le poids du loyer dans le revenu moyen des locataires a plus que doublé entre 1975 et 2018 (de 15% à 35%). Cette observation, semble-t-il paradoxale, s’explique principalement par deux facteurs.
- Hausse de +30% entre 1970 et 2018 de la superficie moyenne des logements (ce qui est retraité dans le calcul de l’indice) loués.
- Baisse du nombre moyen de personnes par logement (-32% depuis 1970).
Ces effets cumulés ont conduit à une hausse de 75% de la surface de logement moyen par locataire. La hausse de la part du loyer dans le budget des locataires reflète ainsi la hausse de la superficie disponible par locataire et non l’augmentation des loyers au m2. Elle reflète également la hausse du niveau de confort des logements loués (chauffage et WC individuel, cuisines équipées…). Deux indicateurs retraités à juste titre dans le calcul de l’indice.
Cette hausse de la part du loyer dans le revenu des locataires s’explique par ailleurs dans une moindre mesure par le fait que les locataires ont un revenu plus faible que la moyenne des ménages français. Ce sont en proportion importante des jeunes, dont le revenu disponible a augmenté moins rapidement que celui des ménages français (du fait de l’allongement des études, montée du chômage chez les jeunes, emménagement en couple plus tardif…) sur la période, malgré une amélioration depuis 2010.
Une faible différenciation géographique.
Il existe peu de différenciation géographique : l’ évolution des loyers constatée à Paris et à Lyon est semblable à celle observée au niveau français.
=> A qualité constante, le pouvoir d’achat locatif des ménages français est globalement stable depuis 1965.
Analyse de l’évolution des prix
De 1965 à 2018, une multiplication par 3 de l’indice des prix de logements anciens.
L’indice de prix des logements anciens en France a été multiplié par x3 entre 1965 et 2018, à monnaie constante. Soit une hausse annualisée de +2,1%/an. On peut distinguer trois grandes phases entre 1965 et 2018.
- Période 1965-1997. Durant celle-ci, l’indice des prix a augmenté de 1,3%/an, en ligne avec le revenu disponible des ménages. Cette hausse a été ponctuée de deux périodes (de 5 années chacune) de baisse de l’indice des prix, en 1981-1986 et en 1991-1997.
- Période 1997 et 2007. L’indice des prix des logements anciens en France a augmenté très fortement, de +7%/an, soit plus qu’un doublement sur la période.
- Depuis 2008 et jusqu’à aujourd’hui. L’indice des prix est resté à un niveau très élevé, en très léger recul sur la période.
Depuis la fin des années 1997, une hausse de l’indice des prix des logements anciens beaucoup plus rapide que celle du revenu moyen des ménages.
De 1965 à la fin des années 1990, l’indice des prix des logements anciens en France suit, à quelques variations près, l’évolution du revenu disponible des ménages. Ainsi, le prix des logements anciens rapporté au revenu disponible des ménages est resté globalement stable sur la période, compris dans un “tunnel”, le fameux tunnel de Friggit (+ ou – 10% autour du niveau de 1965). C’est une évolution conforme à l’intuition. L’augmentation du revenu disponible améliore le pouvoir d’achat des ménages, ce qui pousse l’indice des prix à la hausse.
La période “anormale” est celle observée à partir de 1997, période pendant laquelle l’indice des prix des logements a augmenté très rapidement, beaucoup plus vite que le revenu disponible des ménages. En effet, l’indice des prix a été multiplié par x2 entre 1997 et 2018 tandis que le revenu disponible des ménages n’a progressé que de +6%! L’indice des prix des logements anciens rapporté au revenu moyen des ménages est ainsi sorti de son “tunnel” historique.
Quelle différenciation géographique observe-t-on ?
La hausse de l’indice des prix a été moitié plus importante à Paris qu’à l’échelle nationale. A Lyon, elle a été encore plus importante (pour les appartements) avec une augmentation de près de 70% supérieure à celle observée en France.
N.B: le dénominateur de tous les ratios est le revenu disponible par ménages sur l’ensemble de la France
En conséquence de cela et malgré la diminution du coût des crédits immobiliers sur la période, le pouvoir d’achat immobilier des ménages a baissé de près de 20% entre 2000 et 2018 (hors effet de l’allongement des durées de remboursement), malgré une belle amélioration depuis 2008 suite au pic de 2012. Pour acheter le même logement un primo-accédant à la propriété doit s’endetter sur 20 ans en 2019 contre 15 ans en 1965 ou en 2000.
Note : à Lyon, il faut à un primo accédant 40 ans pour acheter le même logement qu’il aurait obtenu en 2000 en 15 ans…(x2,6). A Paris, il faut 35 ans (x2,2) et 24 ans en Ile de France. Il s’agit d’un écart du simple au double entre ces 2 villes et le reste de la France.
Comment expliquer cette sortie du tunnel à partir de 2000 et le niveau extrêmement élevé de l’indice des prix ?
Selon J. Friggit, deux types de facteurs exceptionnels pourraient avoir impacté le prix de cession des logements. Premièrement, un choc entre l’offre et la demande de logement. Deuxièmement, un changement important des conditions de financement. Analysons ces principales causes possibles.
Expliquer la hausse de l’indice des prix par un choc dans le rapport entre l’offre et la demande de logements ne tient pas
L’explication par la pénurie de logements (une offre qui ne s’ajuste pas assez vite à la hausse de la demande) ?
Certains avancent l’hypothèse selon laquelle le niveau actuel des prix des logements anciens en France (et leur augmentation beaucoup plus rapide que celle du revenus disponible des ménages entre 1997 et 2007) est du à une offre de logements insuffisante. En raison d’une augmentation du parc de logements moins rapide que celle du nombre de ménages. Notons en effet que la demande d’achat de logements a été fortement tirée à la hausse en France du fait de a) l’augmentation de la population, b) la dé-cohabitation progressive des ménages avec l’augmentation du nombre de divorces et c) le vieillissement de la population.
Néanmoins, cette explication ne tient pas. S’il y avait eu à partir de 1997 une tension accrue pour l’accès au logement, on aurait constaté une hausse de l’indice des loyers à un rythme similaire. Or, à l’échelle du pays, l’indice des loyers a augmenté de manière modérée et « normale », au même rythme que le revenu disponible des ménages (comme vu précédemment).
Par ailleurs, des études ont montré la faible élasticité du prix des logements par rapport à une variation du parc de logements nette de la variation du nombre des ménages. Celle-ci à été établie à -2, soit une diminution de l’ordre de 2% du prix des logements en cas de variation de +1% de la taille du parc. Ce qui est faible. Comme le précise J. Friggit, un éventuel déficit de quelques centaines de milliers de logements (soit quelques pourcents du parc français), ne pourrait donc expliquer qu’une très faible partie de la très forte hausse du prix des logements entre 1997 et 2007.
Note : précisons néanmoins qu’un déficit d’offre de logements explique, localement seulement, une partie de l’envolée des prix. C’est le cas notamment à Paris et Lyon, du fait de la concentration urbaine (hausse de la demande) associée à la rareté du foncier (frein à l’ajustement de l’offre) et de contraintes urbanistiques (frein à l’ajustement de l’offre) fortes.
L’explication par la hausse du coût du foncier et de la construction ?
Dans le contexte d’une hausse générale de la démographie française, associée au vieillissement de la population (beaucoup plus de propriétaires chez les personnes âgées que chez les jeunes) et au phénomène de dé-cohabitation (avec notamment l’augmentation des divorces), l’ajustement de l’offre en France passe par la création de nouveaux logements. Le coût de création de nouveaux logements est le coût du foncier + le coût de construction. Celle-ci pourrait, à la marge, impacter les prix à la hausse si le coût de création de ses logements augmentent.
Néanmoins, on n’observe pas d’augmentation générale importante du coût du foncier (sauf localement dans les grandes métropoles en raison de la concentration urbaine et des règles parfois restrictives et contraignantes relatives à l’utilisation des sols) ni du coût de construction en France. Cela ne peut donc expliquer la hausse rapide du prix des logements à partir de 1997.
Le sens de ce lien de causalité est par ailleurs contestable. Il semble en effet que ce soit la hausse des prix de logements qui entraîne la hausse du prix du foncier et non l’inverse. Le prix du foncier est en effet estimé par les promoteurs en fonction de l’estimation du prix de revente des futurs logements, basé sur les prix déjà établis localement. Et on peut imaginer, bien que ce ne soit à ma connaissance pas prouvé, qu’en cas de baisse des prix, on verrait d’abord une baisse du prix des logements puis en réaction une baisse du prix du foncier et non l’inverse.
La hausse des prix en France est principalement due à un changement important et rapide des conditions de financement
La forte baisse des taux.
Nets d’inflation, les taux d’intérêt immobiliers sont passés de 4% en 2000 à 0,5% en 2018 (>6% en 1990), un niveau extrêmement bas.
Les taux nominaux (ceux affichés par les banques) sont mécaniquement un peu plus hauts mais néanmoins historiquement bas également.
Cette baisse des taux, en allégeant le coût du financement et le pouvoir d’achat des ménages explique très certainement une partie de la hausse du prix des logements sur la décennie 1997-2007. Une diminution du taux d’intérêt de 1% augmente en effet (à mensualités et à durée de prêt constantes) de 8% le capital qu’un ménage peut emprunter et de 6% environ le prix des logements qu’il peut acheter. A noter néanmoins que la corrélation entre taux d’intérêt et prix de l’immobilier n’est pas systématique. Par exemple, le 1991 à 1998, les taux d’intérêt (nominaux et nets d’inflation) ont diminué concomitamment à une baisse des prix.
L’allongement significatif de la durée emprunt.
L’allongement de la durée des prêts immobiliers a commencé à partir de 1997, période à partir de laquelle l’indice du prix des logements a connu son envolée. Depuis 25 ans, la durée des prêts a augmenté de près de 10 ans en moyenne, à un niveau historiquement très élevé qui constitue une vraie rupture par rapport à la période antérieure.
Cette augmentation de la durée des prêts a augmenté mécaniquement d’environ 22% le prix de logement qu’un ménage peut acquérir. Cet effet fort et immédiat sur la capacité d’endettement des ménages à court terme est de nature à expliquer une part importante de l’envolée de l’indice des prix sur la période.
Conclusion
Parmi l’ensemble des facteurs qui ont pu contribuer à l’envolée des prix observée depuis 1997 en France, l’allongement de la durée d’emprunt qui a débuté à la même date, par son effet immédiat et massif, est sans doute le facteur le plus déterminant. La baisse concomitante des taux d’intérêt a très certainement joué un rôle amplificateur.
Note : localement (à Paris, Lyon, Rennes, Bordeaux, Toulouse…), un phénomène de concentration urbaine associée à un faible ajustement de l’offre de logements du à la rareté du foncier, a par ailleurs contribué à accentuer la tension à la hausse sur les prix. La thèse de l’achat étranger, souvent amenée pour expliquer le niveau des prix à Paris, ne tient pas du fait de la faible part de ces achats (en volume et en montant) dans le total des transactions.
Deux facteurs ont sans doute par ailleurs alimenté cette envolée (ou limité l’ajustement à la baisse de la demande).
- Un phénomène d’auto-alimentation de la hausse des prix (les investisseurs anticipent qu’elle va se poursuivre en projetant dans le futur les évolutions passées et continue d’acheter, même à des niveaux très élevés, avec l’hypothèse que la hausse continue des prix offrira une plus-value de cession à terme, compensant le faible rendement locatif). Ce phénomène n’est bien entendu pas durable.
- A la marge, la hausse des prix de l’immobilier, en enrichissant les propriétaires de logement, les immunise contre la hausse des prix et leur permet plus facilement d’acheter une 2nde propriété.
Quelles évolutions possibles pour les prix ? Loyers ?
Evolution possible des loyers
En ce qui concerne les loyers, ils devraient poursuivre leur évolution en ligne avec le revenu disponible des ménages tandis que la part du loyer dans les dépenses de logements des locataires pourraient continuer d’augmenter légèrement si la hausse provient de l’amélioration de la qualité des logements. Le contexte actuel de crise économique liée au Coronavirus fait pression à la baisse sur le revenu des ménages (hausse du chômage, revenus en baisse pour un grand nombre d’entreprises…). Ce qui devrait faire ponctuellement pression à la baisse sur l’indice des loyers. L’importance des aides aux locataires les plus modestes permettra en France de limiter les conséquences du recul des loyers.
Les prix: quelle évolution possible de l’indice des prix à court-terme (5 ans) en France ?
La poursuite de la hausse des prix plus rapide que celle du revenu des ménages paraît très peu probable, pour les raisons suivantes.
- La part du remboursement des mensualités de logement dans le revenu disponible des ménages est déjà à un niveau historiquement très élevé. En cas de poursuite de l’envolée des prix, les ménages arbitreraient davantage en faveur de la location, ce qui engendrerait une pression à la baisse sur les prix.
- On constate depuis le pic de 2007 un léger recul de l’indice des prix rapporté au revenu disponible des ménages.
- L’assouplissement et la baisse du coût des crédits immobiliers ne sont pas extensibles à l’infini. La menace d’un endettement immobilier trop élevé des ménages (qui est passé de 33% à 81% du revenu disponible des ménages entre 2000 et 2018) est devenu récemment une préoccupation des autorités de régulation financière qui ont suggéré un durcissement des conditions de financement. Aussi bien pour les accédant à la propriété et pour les investisseurs (⅕ des acheteurs). En ce qui concerne le coût du crédit immobilier, bien qu’il est peu probable qu’il augmente à court-terme, il peut difficilement baisser d’avantage.
- Le rendement locatif dans les grandes métropoles françaises, où s’est concentrée une part importante de la hausse des prix, est déjà à un niveau extrêmement bas. Une hausse des prix contribuerait à détériorer davantage le rendement locatif, et finirait sans doute par détourner les investisseurs de ce type d’achats.
Vers un retour à un palier plus bas ?
L’effet inflationniste de l’assouplissement des conditions de financement n’est par nature pas durable dans le temps. L’allongement de la durée des emprunts a permis d’augmenter significativement l’encours et le niveau d’endettement des ménages (comme on l’a vu précédemment). Ce qui va freiner ultérieurement la demande de nouveaux logements. Sans compter qu’un durcissement des conditions d’emprunt n’est pas exclu à court terme, ce qui viendrait exercer une pression inverse sur les prix. Une hausse des taux d’emprunt, par exemple, aurait un effet déflationniste immédiat sur les prix.
Le scénario d’une baisse de l’indice des prix rapporté au revenu disponible des ménages (ce que l’on a par exemple observé aux Etats-Unis en Espagne et dans une moindre mesure au Royaume-Uni) et un retour à un niveau “parallèle” à son niveau historique me semble donc le plus probable. La question reste de savoir si le palier se situerait au même niveau que celui de la période 1965-2000 ou à un niveau intermédiaire. Sans une tension accrue entre la demande et l’offre de logements (ce que l’on n’a pas observé jusque là puisque l’indice des loyers a évolué au même rythme que celui du revenu disponible des ménages), il est très probable que l’indice des prix revienne à un niveau proche de son tunnel historique.
A quelle vitesse ?
La baisse de l’indice des prix ne sera pas homogène géographiquement et ne se produira sans doute pas de manière brutale, pour plusieurs raisons:
- le niveau d’endettement des ménages français, bien qu’élevé, reste moins important que celui des américains au moment de l’éclatement de la bulle immobilière en 2008 (il avait dépassé 140% du revenu des ménages à son pic fin 2007, contre 81% en 2018 en France) et les autorités de régulation ont déjà commencé, début 2020 à mettre en garde contre un risque de surchauffe. Par ailleurs, le taux de défaut sur les crédits immobiliers en France reste à un niveau très bas du fait de règles d’octroi des crédits immobiliers assez conservatrices en France (pas d’octroi massif de crédits hypothécaires à risque comme lors de la bulle des « subprimes » aux Etats-Unis).
- on n’observe pas en France d’hypertrophie du secteur de la construction, comme cela a pu être le cas en Espagne. La hausse des prix n’a pas entraîné une hausse incontrôlée de création de logements, ce qui limite le risque d’effondrement des prix.
Les prix: quelle évolution possible de l’indice des prix à long-terme ?
A long terme (20 ans), malgré un ajustement probable des prix à la baisse à court-terme, on devrait continuer d’observer une évolution des prix des logements en lien avec des facteurs structurels long-terme : évolution du revenu disponibles des ménages, démographie.
Une hypothèse selon moi réaliste est un évolution tendancielle long-terme de l’indice des prix en ligne avec celle observée sur la période 1965-2000, à savoir une augmentation d’environ +2%/an, à monnaie constante.
Conclusion :
Il est peu probable qu’une tension accrue entre l’offre et la demande de logements ait causé l’envolée des prix en France (sauf localement comme nous avons pu le préciser en raison d’une pénurie de foncier). Si tel était le cas, on aurait observé une envolée similaire de l’indice des loyers sur la période. Ce qui n’a pas été le cas.
Le changement des conditions de financement, qui a modifié le prix d’achat d’équilibre entre l’offre et la demande de logements sans affecter celui des loyers, explique de manière beaucoup plus convaincante la hausse spectaculaire et historiquement anormale des prix entre 1997 et 2007. Jusqu’à un niveau encore actuellement très élevé. En particulier, l’allongement rapide de la durée d’emprunt des crédits immobiliers, qui a débuté en même temps que l’envolée des prix et qui fut également une “anomalie” historique, est de nature à expliquer cette hausse rapide, en améliorant fortement et de manière immédiate la capacité de financement des ménages.
La hausse de la capacité d’emprunt des ménage (à niveau de revenu constant) a un effet seulement court terme sur les prix. La hausse du niveau d’endettement qui en a résulté ralentira en effet la demande future de logements. Sans réel choc de demande, on devrait alors observer un retour de l’indice des prix vers son niveau historique.
Ce retour à la normal de l’indice des prix devrait être progressif. La situation française est en effet assez différente de la situation espagnole ou américaine qui avait débouché sur une chute brutale du marché immobilier. Difficile de dire dans quelle mesure il affectera les grandes villes métropoles françaises où l’envolée des prix a été la plus forte. Les tensions sur le foncier avec la poursuite du phénomène de concentration urbaine pourrait servir de protection face à la stagnation (voir à la baisse) des prix, en freinant l’augmentation de l’offre. Les niveaux actuels ne semblent toutefois pas tenables. En cas de durcissement des conditions d’emprunt immobilier (taux et durée d’emprunt) ou de prolongement durable de la crise actuelle liée au Coronavirus, le rééquilibrage sera certainement plus rapide. Le développement des pratiques de télé-travail est également un facteur qui devrait concourir à ce réajustement des prix.
Compte tenu de ce contexte, je vous conseille depuis plusieurs années dans le cadre de vos investissements locatifs de vous concentrer uniquement sur le rendement locatif et non sur la recherche de plus-value (lointaine et aujourd’hui incertaine).
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